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Le travail, c'est la santé !
Le travail, c'est la santé !
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5 janvier 2010

Dimanche 26 octobre 2008

Confiture de voitures - L’autre jour, je suis allée à une réunion avec des chômeurs. Tous autant que nous sommes, nous sommes là pour réfléchir à notre avenir, dans une perspective travaillistique.
J’avoue, au début, j’étais un peu méfiante. Il y a là quelques trentenaires, et comme ceux avec lesquels j’ai travaillé récemment étaient plutôt bâtis sur le modèle gros mongoliens limite fachos...

Je restais donc sur ma réserve, j’ai commencé à me détendre quand je les ai entendus rire et se moquer un peu de la situation (franchement, c’est vrai que certains tests sont assez croquignolets...). Et puis une nana a raconté son entretien pour faire télévendeuse pour une grosse boîte qui propose des crédits à la consommation au modique taux de 20 %. Et j’avoue que j’ai apprécié de l’entendre dire qu’elle trouvait franchement dégueu de proposer des cartes de crédit avec des taux aussi monstrueux, que c’était juste un moyen comme un autre de mettre aux gens un revolver sur la tempe en leur demandant de trouver ça bien.

Non, parce que des fois, je me demande si c’est moi qui ai des idées noires, alors ça fait quand même du bien d’entendre ça. Merci beaucoup à cette jeune fille !

Un truc très bizarre : la nana qui dirige notre groupe et nous propose plein de photocopies à remplir a un peu ricané quand un des gars a dit qu’il n’était pas bling bling. « Ah, elle a dit sur un ton limite méprisant, vous êtes pour la décroissance, hum ? » Ensuite, elle a carrément dit au gars que le fait d’avoir une voiture pourrie pouvait être vécu par les gens qui n’ont pas une voiture pourrie comme de la provocation.

Je lui ai demandé si elle n’avait pas le sentiment d’aller un peu loin en parlant de provocation dans ce cas, mais elle a développé en disant que lorsqu’on avait une voiture pourrie, on forçait les autres gens à réfléchir sur leur vie et ça les agressait.

Heu oui ? Peut-être aussi que le gars n’a pas les moyens d’avoir à la fois une bagnole argentée dernier modèle et d’autres choses, qu’il n’a pas les moyens de s’acheter tout ce qu’il aurait envie de s’acheter, parce qu’il n’a pas tellement de sous, et que du coup, la voiture passe en dernier dans son programme d’achat ? En tout cas, je suis restée un peu interloquée de la réaction de cette nana : je vais drôlement me méfier quand on sortira en ville dans notre vieille caisse hors d’âge et complètement démodée mais confortable, mais agréable à conduire, et qu’on n’a de toutes façons pas les moyens de changer, histoire qu’un type dans une voiture neuve mais agacé par notre intolérable provocation ne nous saute pas à la gorge...

N’empêche, on ne m’enlèvera pas de l’idée que pour que des gens se sentent obligés d’acheter une bagnole neuve et en veuillent à ceux qui ne le font pas, c’est que malgré tout, ils ont la nette impression de se faire arnaquer. Sauf qu’ils se trompent de cible.

Toi, avec ta voiture neuve que tu t’es pris un crédit de fou pour payer, que tu te sens étranglé dans ta vie, dis-toi bien que le type qui roule dans une vieille voiture n’y est pour rien et que si ça se trouve il fait du karaté !

Le travail, c'est la santé... - Plus ça va, plus je m’installe dans mon rôle de chômeuse. Oui, enfin, bon, disons que j’apprends à faire avec...

‘toutes façons, j’ai jamais été très branchée par tous ces discours sur la réussite professionnelle et je regardais avec horreur les dégâts que la fréquentation des rats dans leur roue qui tourne tout le temps occasionnait chez moi, du temps que j’allais pointer tous les matins à la fraîche, après avoir envoyé ma frêle enfant blonde à l’école à grands coups de pompe dans le derrière, histoire de lui rappeler que sa mère avait des choses un peu plus importantes à s’occuper dans la vie que son confort et qu’il fallait qu’elle y mette du sien et se dépêche et un peu plus vite que ça.

Le truc bien, c’est que ça la préparait à la super vie qui l’attend quand ce sera son tour de se jeter tête la première dans la grosse machine.

Pendant que la plupart des gens qui travaillent n’en peuvent plus de dire qu’ils bossent trop et qu’ils n’ont pas de temps pour eux, que leur vie leur passe sous le nez, la plupart des gens qui ne travaillent pas aimeraient bien travailler un peu.

Je dois être simpliste ou con (ou peut-être les deux à la fois, va savoir), mais ça serait pas plus malin de réorganiser le travail, maintenant qu’il est clair que l’automatisation, l’informatique, la mondialisation et autres progrès enviables ont totalement changé la donne, que les schémas ont changé, qu’il faut tenir compte des nouvelles réalités ?

Des fois, on a comme l’impression de vivre dans un pays qui érige la schizophrénie en système de pensée. D’un côté on te vend le futur sur tous les tons, on délocalise à tours de bras, on planétise les enjeux commerciaux, de l’autre on fait comme si rien ne se passait et que le plein emploi restait un but possible à atteindre si ces crevures de chômeurs voulaient bien un peu s’enlever les doigts du cul.

Si tu supprimes les emplois du secondaire (et bientôt certains de ceux du tertiaire, l’Inde n’a pas dit son dernier mot), fatalement, tu te retrouves avec des chômeurs sur le dos. Bon, tu me diras, ils n’ont qu’à bosser comme auxiliaires de vie (une valeur en hausse, ça, la gérontologie) ou dans l’hôtellerie-restauration. J’avoue que je songe sérieusement à me recycler dans l’hôtellerie (je parle anglais, et tant qu’à faire un boulot qui ne me plaît pas plus que ça, autant que ça soit assise derrière un comptoir).

Le truc, c’est qu’en plus de te demander de faire des boulots pour lesquels a priori tu ne ressens pas une appétence particulière, on te demande en plus d’être super enthousiaste et de faire croire que tu es pratiquement au bord de l’orgasme à l’idée de devoir envisager ton rapport à ton boulot sur un plan strictement alimentaire. Pendant des années, pourtant, on te l’a seriné, le discours de l’épanouissement et de l’accomplissement dans le monde du travail.

Je dois avouer que j’avais fini par y croire, moi, au coup du travail que l’on accomplit dans la joie parce qu’il comble des aspirations personnelles. Et je découvre qu’il faut vite que je me calme et qu’il est urgent que je me fasse une grande injection du sens des réalités. En gros, maintenant, vu le marché de l’emploi et ta grande faute de chômeuse pas dans les bonnes cases, il va falloir que tu révises fissa tes aspirations personnelles à la baisse, que tu prennes conscience qu’on travaille avant tout pour gagner sa vie, pas pour se faire plaisir, non mais des fois. Mais il faut tout de même que tu sois motivée et hyper disponible, compétente et profilée.

C’est où le vestiaire pour passer la tenue commando ? Ah, y’a pas de vestiaire, en plus !!!

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