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Le travail, c'est la santé !
Le travail, c'est la santé !
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16 décembre 2009

Des us et coutumes de la vie de bureau

L’agent Pat Ogène est malingre, voire fluet, et d’élévation minuscule. Il entretient avec la gent féminine (en dehors de madame la Bouse dont il a l’immense bonheur de partager le quotidien) des relations, disons assez particulières...

Dans le cadre de la vie de bureau, il a accédé au grade de chefaillon et contemple avec un plaisir toujours renouvelé la médaille en chocolat qu’on lui a remise lors de sa nomination à ce poste ô combien enviable.

Pragmatique, l’agent Pat Ogène entend user de tous les privilèges attachés à ses fonctions et à son grade.

Ainsi, lorsque de nouvelles recrues rejoignent le staff (l’agent Pat Ogène est plein de vocabulaire), il les reçoit à grands coups de pompe dans le derrière, perché sur ses ergots. Doit-il leur demander d’accomplir une tâche, il le fait en parsemant ses instructions de remarques plus ou moins perfides destinées à déstabiliser les pauvres malheureuses et il signale au passage qu’il s’agit d’un test. Il tente de les ridiculiser, ses petites mains blanchâtres croisées d’un air benoît derrière son dos, sautillant d’allégresse sur ses talonnettes.

Il faut être juste. L’agent Pat Ogène, dans le cadre de la vie de bureau dont il est un des plus fiers représentants, aime tenter de terroriser toutes les jeunes femmes en général. Pourvu qu’elles soient jolies, hiérarchiquement à un niveau inférieur, et qu’il n’ait aucune chance qu’elles le considèrent comme autre chose que ce qu’il est, c’est-à-dire un minable brimborion de la plus basse espèce, il se fait un plaisir de leur casser les bonbons, de les remballer dès qu’elles lui demandent une information nécessaire à l’accomplissement de leur travail, de les pourrir, de leur parler mal. Son plus grand plaisir est de les sentir se décomposer sur pied. Qu’on lui résiste et il durcit le ton, passant de l’insidieuse ironie au ton cassant.

C’est une grosse perte d’énergie que de tenter de le renvoyer chez sa mère, car il est passé maître dans cet art subtil qui consiste à chercher à emmerder le monde.

Sacré agent Pat Ogène, on passe toujours de bons moments en sa compagnie !
(Image lilliputienne : Dilbert, un survivor de la vie de bureau, et son chef, lequel se livre à la culture étronesque sur crâne d’œuf)

Le travail, c’est la santé !


Ce matin, l’agent Pat Ogène et madame la Bouse se réveillent au son de leur radio préférée. Ils écoutent l’émission très fort (ils sont un peu sourds, leurs oreilles en ont assez de toutes les conneries qu’on leur fait entendre, alors elles ont fini par se recroqueviller, petit à petit).

Ils boivent plein de café, ça met en train, se gueulent un peu dessus (ça fait des années qu’ils se supportent plus qu’autre chose, mais c’est comme ça). Après, ils arrivent tous les deux à leur boulot et quand on leur dit bonjour, ils répondent à peine. C’est qu’ils sont très importants dans leur travail. S’ils n’étaient pas là, la boîte se casserait la figure, ils sont les piliers du bouclard. Cela fait des années qu’ils sont dans la même entreprise (une grosse boîte, il y a des avantages et puis quand même, c’est plus sûr).

Parfois l’agent Pat Ogène vient travailler en chaussons. Il lui arrive de quitter longuement son bureau pour aller boire un coup au bistrot d’à côté. Lui, il ne fait pas comme ces pauvres types qui vont à la cantine en dehors des heures de repas pour se taper un petit coup de rouge en vitesse : il a sa dignité.

Quand il n’est pas là, tout le monde respire dans le bureau car l’agent Pat Ogène est très bruyant, fait des sales blagues pas drôles qui le font s’esclaffer sans vergogne, tape comme un sourd sur le clavier de sa machine, sifflote, parle fort et inutilement.

L’agent Pat Ogène est aussi un vrai lèche-cul de haute qualité : méprisant avec ceux qu’ils considèrent comme inférieurs dans la hiérarchie de la structure et obséquieux dégoulinant avec ceux qu’il considère comme supérieurs. Il se la pète grave et se prend pour un gros malin qui a tout compris et ses petits yeux marronnasses sans lumière s’essaient à la malice.

Mais l’agent Pat Ogène confond malice et limace.

Madame la Bouse, quant à elle, est tout le temps désagréable avec ses collègues, vérifie leur travail avec frénésie – ça ne rentre pas dans ses attributions, mais si elle ne le fait pas, qui le fera ? – et soupire à gros jets de locomotive : si elle ne fait pas le travail, c’est ni fait ni à faire. Elle aime bien se raconter des trucs comme ça, on ne sait pas trop pourquoi. Et personne ne le lui demande, elle a failli mordre quelqu’un un jour de pleine lune; depuis, ses collègues se tiennent à distance. Elle est désagréable avec tout le monde et en veut à ceux qui ne lui parlent plus : ils devraient comprendre qu’en fait elle a un cœur d’or et des trésors d’intelligence à partager avec ceux qui voudront bien faire l’effort de la comprendre. Madame la Bouse lit trop les journaux pour ados ou bien ?

Le soir, ils rentrent chez eux après leur dure journée de labeur et leurs collègues respirent enfin pour de bon. Même l’agrafeuse se décrispe et émet un reflet guilleret. Elle en profite, elle sait que dès demain l’agent Pat Ogène et madame la Bouse seront de retour, pleins de fureur rentrée, de névroses rampantes et de connerie agissante, prêts à faire de leur journée et de celle des autres un petit enfer.

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